Spoiler : lever en capital-risque (VC) n’est ni la voie la plus rapide, ni la moins chère, ni la plus adaptée à 80 % des projets. Oui, un tour VC peut accélérer… mais au prix d’une dilution sévère, d’objectifs de croissance parfois irréalistes et d’un calendrier qui n’est pas le vôtre. Voici cinq options souvent sous-estimées — parfois carrément méconnues — pour financer la croissance sans céder la majorité de vos parts.
Principe. Vous recevez un montant (ex. 200 k€) que vous remboursez par un pourcentage de votre chiffre d’affaires mensuel (ex. 5 %) jusqu’à atteindre un multiple convenu (ex. 1,3×, soit 260 k€). Pas de dilution, pas d’échéance fixe : les remboursements s’ajustent à votre traction.
Idéal si
vous avez des revenus récurrents (SaaS, e-commerce avec répétition, marketplace) ;
votre marge brute est correcte (>50 %) ;
vos revenus sont prévisibles (MRR, abonnements, cohortes stables).
Avantages
Non dilutif, décisions rapides, documentation souvent plus légère qu’un prêt bancaire.
Alignement naturel : si le mois est plus faible, vous remboursez moins.
Points d’attention
Coût total (le multiple), parfois plus élevé qu’un prêt classique.
Si vos revenus stagnent, le remboursement s’étire… et votre trésorerie avec.
Petit exemple. 200 k€ avancés, 6 % de votre CA jusqu’à 1,4×. Si vous faites 100 k€ de CA/mois, vous reversez 6 k€/mois et vous aurez tout remboursé en ~14-16 mois. Si votre CA double, vous remboursez plus vite.
Principe. Vous empruntez (banque, prêteur spécialisé, parfois avec garantie publique) pour financer BFR, marketing, recrutement. Le coût est l’intérêt (et parfois des “warrants” symboliques).
Idéal si
vous êtes déjà en croissance avec des indicateurs solides (rétention, LTV/CAC) ;
vous savez où allouer l’argent (canaux rentables, payback court) ;
vous avez une ligne de visibilité sur les flux (ARR, contrats signés).
Avantages
Non dilutif ou quasi-non dilutif ;
Effet de levier : 1 € d’intérêt peut financer 5-10 € de marge future.
Points d’attention
Covenants (ratios à respecter), pénalités si vous dérapez.
Calendrier fixe : un prêt se rembourse quoi qu’il arrive.
Demande de sûretés (nantissements, cautions) selon le profil.
Astuce. Négociez un différé d’amortissement (6-12 mois) pour que la dette finance véritablement la croissance, pas l’asphyxie.
Principe. Financements publics et para-publics (subventions, aides à l’innovation, avances remboursables, crédits d’impôt) pour R&D, industrialisation, décarbonation, export, recrutement.
Idéal si
vous avez un projet innovant (tech, climat, santé, industrie, deeptech) ;
vous pouvez documenter le programme de travail (livrables, jalons, TRL) ;
vous acceptez un calendrier administratif (délais d’instruction).
Avantages
Zéro dilution, effet de levier énorme.
Légitime votre techno : l’instruction force une rigueur utile (planning, budget, risques).
Points d’attention
Temps et rigueur (dossiers, reporting, audits).
Déclenchement par jalons : la trésorerie arrive par étapes.
Astuce. Montez un mix : subvention + avance remboursable + crédit d’impôt (R&D/innovation) + prêt bancaire. Ça amortit les risques tout en accélérant.
Principe. Vous cédez vos créances clients à un factor qui vous avance 80-90 % immédiatement, le solde à l’encaissement (moins frais). Variante : financement de bons de commande (PO financing) pour acheter la matière/produire avant d’être payé.
Idéal si
vous vendez en B2B avec des délais de paiement de 30-90 jours ;
vous avez des bons de commande fermes mais un BFR qui explose ;
vos clients sont solvables (ça baisse le risque pour le factor).
Avantages
Cash quasi immédiat pour financer la production et la croissance.
Externalise une partie du risque d’impayé (selon contrat).
Points d’attention
Coût (commission + intérêts) ;
Relations commerciales : prévenez vos grands comptes si un factor va les relancer ;
Contrats exigeants (clauses de rétrocession en cas de litige).
Astuce. Commencez en sélectif (seulement vos gros facturiers ou les factures > X k€) pour tester l’impact et le coût réel.
Principe. Au lieu de vendre des parts, vous vendez plus tôt :
Préventes / précommandes (ex. campagne limitée avec bonus) ;
Abonnements annuels payés d’avance (réduction vs. mensuel) ;
Design partner program (quelques clients paient pour co-concevoir votre produit) ;
Licences “white-label” ou exclusivités sur un segment.
Idéal si
vous avez déjà une communauté ou une preuve d’intérêt ;
votre proposition de valeur est claire et démontrable ;
vous pouvez livrer à une date crédible.
Avantages
Trésorerie immédiate sans dilution ;
Validation marché béton : le cash qui rentre > tous les “likes”.
Points d’attention
Engagement fort de livraison (logistique, support, qualité).
Remises & perks à calibrer pour ne pas grignoter votre marge.
Gestion des attentes : mieux vaut sur-communiquer que promettre la lune.
Astuce. Proposez une offre “lifetime” limitée (quantité ou durée) pour générer un pic de cash et d’ambassadeurs… sans vous enfermer durablement.
Revenus récurrents prévisibles ? → RBF.
Canaux d’acquisition déjà rentables & marge > 60 % ? → Dette de croissance.
Projet deeptech/industriel/climat ? → Subventions & avances.
B2B avec délais de paiement longs ? → Affacturage/PO financing.
Communauté engagée / pipeline chaud ? → Préventes & prépaiements.
Sous-estimer le coût total : comparez coût effectif annuel (TAEG équivalent) entre options.
Financer l’“ops” fixe avec un outil variable (ex. RBF pour payer des salaires sans plan de croissance ad hoc).
Oublier la marge : toute dette repose sur votre marge future. Sans marge, pas de dette.
Multiplier les outils sans gouvernance : mettez en place un tableau de pilotage trésorerie/BFR par scénario.
Annoncer des délais intenables en prévente : gardez une marge de sécurité et des backups fournisseurs.
Semaine 1-2
Cartographiez vos besoins (BFR, marketing, industrialisation).
Sortez des unit economics à jour (CAC, LTV, marge brute, payback).
Identifiez vos actifs finançables (contrats, MRR, créances, PI).
Semaine 3-4
Montez deux scénarios : “rampe de base” (safe) et “accéléré” (ambitieux).
Ouvrez le deal-flow : prêteurs RBF/dette, dispositifs publics, factors, partenaires “design”.
Préparez un data room light (KPIs, prévisionnel, pipeline, preuves clients).
Mois 2
Négociez en parallèle (termes & frais) pour comparer vraiment.
Testez affacturage sélectif sur 1-2 clients.
Lancez une offre annuelle prépayée auprès des clients les plus satisfaits.
Mois 3
Fermez 1 option principale + 1 complémentaire (ex. dette courte + subvention, ou RBF + prépaiements).
Mettez en place un reporting mensuel (cash-burn, DSCR, covenant, churn, NDR).
Cadrez vos cadences d’investissement (pas d’à-coups qui cassent la trésorerie).
Term sheet en plain French (traduisez les clauses).
Coût total : intérêts + frais + commissions + éventuels warrants.
Flexibilité : différé, remboursement anticipé, step-down du pourcentage (RBF).
Covenants : seuils réalistes au vu de vos KPI actuels.
Garanties : quelles sûretés, sur quels actifs, avec quelles conséquences ?
Calendrier : temps d’instruction vs. votre besoin (runway).
Impacts comptables & fiscaux : échangez avec votre expert-comptable.
La meilleure levée est souvent celle que vos clients financent. Si vous devez compléter, assemblez un panier d’outils non dilutifs (RBF, dette, subventions, affacturage) plutôt que de courir après la term sheet parfaite. Votre objectif n’est pas “lever”, c’est exécuter.
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